En Anjou, des araignées tricotant des chaussettes
Deux espèces de Mygales très semblables vivent à l’état sauvage en Pays de la Loire. Il s’agit de l’Atype affine (Atypus affinis) et de l’Atype calcicole (Atypus piceus). Version miniature de leurs cousines exotiques, elles n’en partagent pas moins la même morphologie. Avec leurs énormes « mandibules » (on parle chez les araignées de « chélicères »), elles ont de quoi fasciner et apeurer. Bien que venimeuses, elles ne sont toutefois pas dangereuses pour l’homme. Peu de chance par ailleurs de les croiser : elles vivent et chassent recluses dans une curieuse chaussette...
- Aspect : un corps trapu, des pattes épaisses mais un tout petit gabarit : 1,5 cm tout au plus. Ceci sans compter les chélicères, ces pièces buccales en forme de pinces munies de minuscules dents. Elles se terminent par des crochets permettant d’injecter le venin. Ces chélicères chez les mygales sont gigantesques et mesurent chez les deux Atypus près d’un quart de leur corps !
- Régime alimentaire : des petits invertébrés, notamment des cloportes et des insectes (en particulier des coléoptères).
- Technique de chasse : Atypus piceus comme Atypus affinis sont des tisseuses hors pair. En guise de toile elles confectionnent une chaussette de l’épaisseur du petit doigt qui est en grande partie enterrée dans leur profond terrier. Cette chaussette est camouflée par l’araignée en étant recouverte de sable, de terre et de débris végétaux. Si un insecte s’aventure sur ce tube de soie bien camouflé, ses jours sont comptés. Les vibrations de ses pas sont perçues par l’araignée qui se précipite depuis le fond de son antre. Elle transperce alors sa proie à travers la toile grâce à ses deux crochets. Puis elle la tire à l’intérieur et la dévore. Elle reprisera par la suite sa chaussette-piège.
- Prédateurs : des mammifères, des oiseaux et même d’autres araignées !
- Longévité : 10 ans environ pour les femelles. Celles-ci mettent 5 à 6 ans à atteindre la maturité tandis que les mâles s’accouplent au bout de 4 ans et meurent quelques mois après.
- Reproduction : le mâle vient toquer, voire franchement tambouriner, sur la chaussette de sa prétendante. Il a tout intérêt à bien s’y prendre pour que les vibrations ne soient pas perçues comme celles d’un délicieux cloporte. L’accouplement a lieu dans le terrier où le mâle tiendra compagnie à la femelle jusqu’à sa mort. Son corps pourra alors servir d’en-cas. La mère s’occupe seule de ses petits durant de nombreux mois avant qu’ils ne prennent leur indépendance relative. Ils n’établiront en effet jamais leur tanière trop loin de celle de leur mère !
Où vivent ces Mygales miniatures en Maine-et-Loire ?
Atypus affinis est de façon surprenante relativement commune en Anjou. Elle se trouve dans des milieux très variés tant qu’elle est au sec et qu’il y fait chaud. Ce sont des pelouses rases de coteaux calcaires, des forêts sur sol sablonneux ou même des jardins rocailleux. Si sa présence est si peu connue, c’est parce qu’elle et ses chaussettes sont très discrètes !
Atypus piceus est quant à elle beaucoup plus rare en Maine-et-Loire. Elle n’a été observée qu’à quelques endroits particulièrement chauds et secs dont le coteau de Pont Barré et le coteau de Martigné-Briand.
Ces mygales ont été observées sur plusieurs espaces naturels sensibles du département dont :
Comment reconnaître ces deux araignées ?
Les deux espèces d’Atypus sont monochromes, allant du beige foncé au noir selon les individus et le sexe. S’il est très difficile de les distinguer, il est beaucoup plus probable de rencontrer une Atypus affinis qu’une Atypus piceus.
Pour les distinguer d’autres araignées, la seule présence de leurs chélicères massives devrait suffire.
Des chaussettes sales qui traînent
Il est possible de faire la rencontre des mâles Atypus lorsqu’ils partent en quête d’une femelle à la fin de l’été. Parfois ce sont aussi de jeunes araignées que l’on peut trouver, lorsqu’elles n’ont pas encore creusé leur demeure.
La majorité du temps toutefois, l’araignée reste cachée au fond de son terrier. Alors, pour savoir si, dans le bois, mygale y est ou n’y est pas, il faut ruser. Les yeux rivés au sol, on partira en quête de quelques chaussettes qui traîneraient là. Le meilleur moment ? Après une averse. Le sol restera humide tandis que la toile terreuse aura déjà séché.