Anjou - Département de Maine-et-Loire
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© Étienne Begouen

Tourbières et ruisseau des Loges

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À deux pas de l’Indre-et-Loire, l’une des dernières tourbières de l’Anjou

À l’Est du Maine-et-Loire, à une vingtaine de kilomètres de Saumur, le ruisseau des Loges prend sa source dans la commune de La Breille-les-Pins. Il ne tarde pas à s’épancher dans l’étang de loisir communal avant de reprendre sa course vers l’Authion.

En chemin, le mince cours d’eau donne vie à l’une des zones humides les plus magiques de l’Anjou. En plein cœur d’un vaste massif forestier se cache la plus grande tourbière du département. D’une trentaine d’hectares, cette zone humide est en réalité composée de plusieurs tourbières très différentes mais tout aussi rares. Ces dernières abritent une biodiversité peu commune et fragile. Des insectes inhabituels cavalent sur l’épais tapis végétal, parfois happés par un batracien ou… une plante carnivore !

La zone humide longe le ruisseau sur deux kilomètres, s’étirant sur chacune de ses berges. Elle prend plusieurs visages, tantôt bas-marais tourbeux, tantôt landes humides, ailleurs boisements marécageux, friches et petites mares.

L’étang de loisir des Loges est facilement accessible depuis le bourg du même nom. Il se prête aux balades familiales, à la pêche comme à la flânerie. La tourbière en contre-bas est en revanche un écosystème très fragile, non aménagé, et dont l’accès est restreint. Sa magie impénétrable rayonne néanmoins aux alentours et sa faune s’invite parfois sur l’étang. La promesse de belles surprises...

Faune et flore des tourbières des Loges

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espèces de papillons de nuit ont été observées sur cet ENS

Au paradis des petites bêtes en tout genre

Les tourbières sont inhospitalières pour de nombreux mammifères. En revanche, elles sont le royaume des insectes et des araignées. L’eau dormante et la profusion de végétaux y sont propices aux Libellules qui s’y reproduisent en nombre. Des espèces rares et menacées comme la Cordulie à corps fin y dévoilent leurs couleurs éclatantes. Elles y côtoient leurs cousines les Demoiselles, souvent bleutées, comme l’Agrion de mercure.

Pas besoin toutefois d’être une libellule pour briller de mille feux ! L’Hoplie bleue, par exemple, mériterait de figurer dans un Indiana Jones. Ce petit scarabée possède une carapace aux reflets lapis-lazuli qui n’est pas sans évoquer l’Égypte antique…

Parmi les petits habitants du site, certains misent toutefois plus sur le son que la couleur pour attirer un partenaire. C’est le cas des criquets et des grillons, comme le Grillon des marais et le Criquet des roseaux. Tous deux sont peu communs et menacés.

L’un de leur prédateur peut être aperçu se faufilant parmi les herbes denses… Ou en pleine séance de patinage aquatique ! Il s’agit d’une araignée, d’une vraie, et non de l’un de ces frêles insectes que l’on nomme à tort « araignées d’eau » (les Gerridés). La Dolomède des marais est grosse, velue, colorée mais peut néanmoins marcher sur l’eau.

Un petit cours d’eau d’une grande richesse

Les eaux limpides du ruisseau des Loges et ses berges préservées attirent une biodiversité remarquable. Les papillons pondent souvent sur des plantes spécifiques et trouvent le long du ruisseau une flore diversifiée. Ils rivalisent de beauté ! Certains font dans les teintes bleutées comme l’Azuré Porte-Queue, l’Argus bleu-céleste et le Petit Argus. D’autres optent pour des variations orangées comme le Nacré de la Ronce ou le Cuivré des marais, typique des tourbières. Quant au Petit Mars changeant, il a des ailes irisées lui permettant de passer du beige orangé au bleu nuit !

Le ruisseau abrite dans ses eaux l’une des dernières populations sauvages de Truite fario en Anjou. La Lamproie de Planer y était également présente autrefois mais elle n’y a pas été revue depuis plusieurs années. Les travaux menés par le Syndicat du bassin versant de l’Authion sur la vallée permettront peut-être de revoir un jour ce curieux animal.

Au moins trois espèces de musaraignes vivent également le long du ruisseau des Loges. Menacées en Pays de la Loire, elles ont trouvé ici un précieux refuge. C’est le cas de la Crocidure des jardins, qui ne se retrouve ailleurs en Anjou que dans les Basses vallées angevines. En revanche, le Campagnol amphibie qui vivait là autrefois n’a pas été revu depuis longtemps…

L’anecdote du naturaliste Des centres de stockage de carbone menacés

Une tourbière est un milieu gorgé en permanence d’eau. La matière organique qui constitue habituellement l’humus (feuilles, plantes mortes…) n’y est jamais à l’air libre. Or, sans oxygène, les bactéries et champignons qui la dégradent ne peuvent faire leur travail. Les déchets végétaux s’accumulent donc au cours du temps et se « momifient ». C’est ce qui donne la tourbe. En piégeant ainsi la matière organique, composée de carbone, les tourbières forment ce que l’on appelle des « puits de carbone ». Mais, si elles venaient à s’assécher, elles relargueraient tout le CO2 accumulé !

Un trésor de perles botaniques

Les tourbières présentent par nature une végétation très originale et celle des Loges ne déroge pas à la règle. Peu de plantes sont en effet capables de prendre racine dans la tourbe et de survivre dans un milieu peu minéralisé.

On trouve notamment sur l’une des tourbières des sphaignes, des mousses capables de se gorger d’eau. Elles dessinent un tapis de mottes parmi lesquelles émergent de petites plantes. Parmi celles-ci, certaines sont devenues carnivores pour pallier le manque de minéraux. La Drosera à feuilles rondes et la Grassette du Portugal capturent toutes deux des insectes grâce à leurs feuilles collantes.

Sur les tourbières alcalines, les sphaignes laissent place à des herbes hautes : les Laîches. Autour de celles-ci poussent des fougères en quête d’humidité, comme la Fougère des marais. Par endroits, ce sont les Bruyères qui dominent, formant des landes humides. On y trouve la Bruyère à quatre angles et un hybride très rare : la Bruyère de Watson.

Certaines plantes menacées se cachent dans les boisements, comme la Parisette à quatre feuilles à l’apparence très géométrique. Ailleurs, c’est la Gentiane pneumonanthe qui déploie ses fleurs d’un joli bleu Klein.

Autre rareté : l’Aconit napel, la belle vénéneuse de la flore française. Réputée être la plante la plus toxique d’Europe, elle porte les jolis surnoms d’Étrangle loup et Tue chien. Extrêmement rare en Anjou, elle est menacée de disparition en Pays de la Loire et quasi-menacée en France.

Fantaisistes Orchidées

De nombreuses espèces d’Orchidées poussent sur le site, comme l’Epipactis à larges feuilles ou le plus rare Orchis de Fuchs. Ce dernier présente des inflorescences fournies et parées de motifs complexes. Ces arabesques sont fréquentes chez les Orchidées sauvages : on les retrouve chez l'Orchis des Bruyères et l'Orchis tacheté. Deux espèces également présentes ici.

L’Orchidée la plus surprenante de l’ENS est sans doute la Néottie nid d’oiseau. À première vue, elle ressemble à une plante morte… Et pourtant ! Si sa tige est plus brune que verte, c’est qu’elle n’est pas capable de réaliser la photosynthèse. Elle s’associe donc à un champignon microscopique qui vole des sucres aux racines des arbres proches et les lui cède. Ce parasitisme indirect ne semble toutefois pas nocif pour les victimes qui ne perdent que peu de ressources.

Un espace naturel sensible à protéger

Dans le cadre d’un plan de gestion, des parcelles de l’espace naturel sensible ont été acquises par la commune de Brain-sur-Allonnes et la Fédération de chasse. Sur celles-ci, un éco-pâturage avec des chèvres des fossés a été mis en place. Objectif : limiter le développement de certaines espèces végétales un peu trop envahissantes. Mais attention ! Comme les chèvres adorent la rare Aconit, il est indispensable de protéger la plante par des grillages. Les suivis de la Ligue pour la Protection des Oiseaux (LPO) nous diront si cela a été suffisant !

Coup de jeune pour la tourbière

Une étude hydraulique a été menée sur le site par le Parc naturel régional Loire Anjou Touraine afin de rendre à la tourbière son fonctionnement naturel. Par le passé, elle a en effet été partiellement drainée. Ces travaux, débutés en 2022, permettront de la rendre plus résiliente face au changement climatique. Les tourbières stockant une grande quantité de carbone, cela permettra également d’éviter qu’en s’asséchant elles ne relarguent beaucoup de CO2.

Le Syndicat du Bassin versant de l’Authion et de ses affluents est le maître d’ouvrages de ces travaux. Le Département participe quant à lui aux financements.

Découvrir l’ensemble des actions du Département de Maine-et-Loire pour la préservation des écosystèmes angevins

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