Anjou - Département de Maine-et-Loire
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© Étienne Begouen

Landes du Fuilet

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En Anjou, des landes nées de l’argile

Dans la commune de Montrevault-sur-Èvre, au Nord-Ouest des Mauges, se trouve un espace naturel sensible (ENS) fait de landes et de marécages. L'extraction de l'argile y a façonné le paysage, créant des dépressions plus ou moins marquées. Ces dernières ont donné naissance à des mares temporaires ou permanentes. De nombreuses espèces rares y ont trouvé refuge, dont de curieux petits dragons aquatiques !

D’autres fosses d’extraction se sont naturellement comblées. Le promeneur découvrira alors des prairies humides, en particulier de précieuses prairies à molinie se parant de teintes violacées à la belle saison ! Un beau tableau, aujourd’hui rare et ce même à l’échelle mondiale…

D’autres paysages attendent également le promeneur : landes humides, landes sèches, saulaies marécageuses et chênaies ombragées… Cette mosaïque d’habitat fait des Landes du Fuilet l’un des espaces naturels sensibles les plus précieux du département. La biodiversité y est foisonnante. S’il se fait attentif et discret, le promeneur pourra la découvrir en suivant les sentiers parmi les bruyères.

Faune et flore des landes du Fuilet

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espèces animales, 706 espèces végétales et 151 espèces de champignons qui y ont été recensées en comptabilisant également l’ENS attenant « Bocage et argilières de la Chaussaire ».

Un précieux refuge pour des espèces patrimoniales

Petits et grands rapaces investissent de jour comme de nuit l’espace naturel du Fuilet. Le Faucon crécerelle, l’Autour des palombes et le Busard Saint-Martin y chassent la journée. Au crépuscule, c’est la Chevêche d’Athéna qui s’active. Cette petite chouette se perche dans les haies pour localiser ses proies dans les champs alentour. La Tourterelle des bois, le Bruant jaune ou encore la Linotte mélodieuse, trois autres oiseaux menacés, profitent également des zones bocagères du site. L’Œdicnème criard, quant à lui, s’accommode des espaces plus ouverts à végétation rase qui lui permettent d’avoir une vue dégagée aux alentours.

Les points d’eau attirent pour leur part des couples de Martins-Pêcheurs mais aussi des Bouscarles de Cetti et des Hérons bihoreaux qui nichent dans les ceintures végétales. Ils profitent également à l’Alyte accoucheur, petit crapaud à l’étrange coassement, et à d’autres amphibiens. Certains trouvent ici l’un de leurs rares refuges dans les Mauges, profitant de la bonne qualité de l’eau.

C’est en particulier le cas pour des versions miniatures du Dimétrodon, ce dinosaure qui arborait une grande crête dorsale ! Il s’agit en réalité des rares et fragiles Tritons marbré et crêté. Quoiqu’en disent leurs noms, les mâles des deux espèces présentent une crête en période nuptiale. Celle du Triton crête est toutefois découpée en dents de scie, ce qui lui donne une allure de dragon aquatique !

Enfin, si l’Hermine, la Genette commune et le Campagnol amphibie n’ont pas été revus récemment sur l’ENS, il est probable qu’ils y soient encore présents. Ces trois petits mammifères protégés sont en effet très discrets. Voir une Genette constitue même le Graal de l’observation pour de nombreux naturalistes !

En été, ça volette de tous côtés !

Dans les landes, les prairies, comme au-dessus de l’eau, les insectes virevoltent en nombre à la belle saison. À commencer par les papillons dont le rare et protégé Sphinx de l’Épilobe. Pour les connaisseurs du Sphinx colibri (ou Moro-sphinx), c’est l’un de ses nombreux cousins ! Contrairement à ce dernier il n’est toutefois pas diurne et ne s’affaire qu’au crépuscule.

De nombreuses et rares espèces de syrphes ont également été identifiées sur le site. Les Syrphes ? Ce sont ces petites mouches qui se déguisent en guêpe ou abeille afin de ne pas être embêtées ! Très rapides, elles peuvent néanmoins être observées lorsqu’elles pratiquent un vol stationnaire caractéristique. La Milésie faux-frelon, notamment, est présente ici. Libellules et demoiselles sont également nombreuses aux Landes du Fuilet. Pas moins de 41 espèces y ont été recensées ! La Cordulie à corps fin et l’Aeschne printanière, deux espèces patrimoniales, s’y reproduisent en nombre.

Quant aux petits criquets présents ici, comme le Sténobothre nain, ils devraient être sur leurs gardes. Une araignée atypique, la Mygale chaussette, a camouflé d’étranges pièges en forme de… chaussette !

L’anecdote du naturaliste

Le « complexe » des grenouilles verte ne désigne pas un manque de confiance en soi chez nos amis batraciens. Il se réfère au fait que distinguer les espèces du monde animal est parfois… complexe. C’est le cas pour les grenouilles que l’on dit « vertes » et qui se ressemblent énormément. Sans compter que « qui se ressemble s’assemble ! » Il existe donc des espèces hybrides. Seule une étude approfondie permet d’identifier à qui l’on a affaire. Les naturalistes parlent donc souvent du « complexe des grenouilles vertes » lorsqu’ils n’ont pu déterminer le spécimen avec précision. Ce qui est très fréquent !

Dans les landes du Fuilet une observation minutieuse a permis de révéler la présence de la Grenouille de Lessona, une espèce protégée !

Parmi les landes, des plantes rares et envoûtantes

Les landes à Bruyère ciliée laissent place, au bord de quelques mares permanentes, à des landes humides. C’est alors la Bruyère à quatre angles qui prédomine.

Dans ces zones humides, le promeneur pourra remarquer comme des amas de feuilles tombées sur l’eau. Ce sont des Potamots, des plantes aquatiques ! Des buissons verts et touffus, totalement immergés, se distinguent également. Voilà cette fois des algues très particulières, au port dressé : les Characées. Très sensibles à la pollution des eaux, elles trouvent ici un refuge précieux.

Dans l’eau toujours, une plante carnivore forme des herbiers ne laissant dépasser qu’une fleur jaune. Cette belle mais vorace habitante est l’Utriculaire citrine. Le Scirpe flottant et le rare Flûteau nageant, une espèce protégée, lui tiennent par endroits compagnie.

Les rares prairies à molinie abritent quant à elles quelques orchidées comme l’Orchis tachetée aux fleurs violettes parées de motifs. L’Orchis grenouille, plus discret, y trouve également refuge. Autre curiosité : la Petite cuscute, une plante qui a la particularité de ne pas produire de chlorophylle mais de parasiter des petits arbustes pour se développer, comme les bruyères et les ajoncs !

L’humidité du sol plaît également à la Fritillaire pintade ou Gogane.

Pas besoin, toutefois, d’aller se perdre dans les landes et prairies pour découvrir l’incroyable flore du site ! Certaines plantes rares attendent le promeneur au bord du chemin, comme cette rare et pourtant si belle Violette lactée. Sur le pétale inférieur de sa fleur, des veinules bleu nuit semble avoir été dessinées à la plume. L’œuvre d’un poète ?

Une histoire aux couleurs de la terre jaune

C’est la main des potiers qui a façonné le paysage des landes du Fuilet. L’extraction d’argile remonte ici au XVe siècle. On tire du sol local une fine terre jaune, plutôt inhabituelle et très appréciée ! Elle est le résultat d’un phénomène géologique très ancien.

Il y a quelques dizaines de millions d’années, durant l’Eocène, le socle rocheux de l’époque s’est en effet altéré. Chaleur et humidité ont transformé les micaschistes, gorgés de quartz et de mica, en une argile. Cette dernière contient beaucoup d’oxyde de fer, ce qui lui confère sa couleur ocre !

L’argile du Fuilet a été utilisé pour produire des pots, des briques, des tuiles... Ils étaient autrefois acheminés via la Loire partout en Anjou et au-delà. Pour les produire, les paysans potiers ont creusé des trous mais également coupé du bois pour les fours et laissé paître les bêtes de somme. Des actions qui ont permis de créer les zones humides d’aujourd’hui et de maintenir de nombreuses landes.

L’industrialisation d’après-guerre a toutefois eu peu à peu raison de cet artisanat. Au début du XXe siècle, c’étaient des centaines de potiers, tuiliers et briquetiers qui s’étaient installés autour des landes du Fuilet. Aujourd’hui il n’existe plus qu’une seule entreprise. L’association la Maison du Potier fait découvrir cet artisanat et cet art et valorise le patrimoine du lieu.

Un espace naturel sensible protégé

Sans l’action de l’être humain, les landes de Fuilet se transforment : elles se changent peu à peu en forêt. C’est un cycle naturel qui est ici à l’œuvre. S’il reste autant de landes sur l’espace naturel, c’est grâce à l’activité passée des paysans potiers. Leur absence aujourd’hui fait que le paysage tend à se « fermer ». Les arbres poussent, pour le plus grand malheur du Busard Saint-Martin, de la Vipère aspic et de bien d’autres espèces qui ont besoin de milieux peu boisés, dits « ouverts ».

Un plan de gestion a démarré en 2021 afin de préserver le site. En parallèle de la restauration des landes, de nombreuses autres actions sont prévues. La prairie à Orchis grenouille, par exemple, devrait être maintenue grâce à la fauche.

Certaines argilières ont tendance par ailleurs à se boucher et les remblais devraient donc être exportés. Les sites d’extraction encore exploités devraient par ailleurs être réaménagées dans le futur afin d’accueillir eux aussi une riche biodiversité.

Un suivi de certaines espèces patrimoniales est également réalisé sur l’ENS.

Découvrir l’ensemble des actions du Département de Maine-et-Loire pour la préservation des écosystèmes angevins

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